2000 Jack Vanarsky
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Le 28 mars 1671, Charles Le Brun, premier peintre du roi, chancelier de l’Académie royale de peinture et de sculpture, relut devant cette illustre compagnie, en présence de Colbert, une conférence déjà présentée antérieurement sur la physiognomonie. Elle était accompagnée de dessins montrant des têtes d’animaux (l’aigle, le chameau, le bélier, l’âne, le chat) confrontées à des faciès humains leur ressemblant. De cette affinité physionomique, il tirait des conséquences sur le caractère des propriétaires de tels visages. J’ai voulu soumettre ma tête aux parangons inventoriés par Le Brun. Loin de moi l’idée de chercher dans ces profils des arcanes psychologiques. Je n’agis qu’en technicien de surface. Petit artisan, je n’ai même pas manipulé des écrans d’ordinateur. Bêtement – c’est là ma ressemblance avec mes modèles – j’ai passé ma tête portraiturée au fil de la cisaille. En appliquant mes procédés de correction de tracés par lamellisation, j’ai amené ma silhouette à épouser, non pas celles des animaux, mais celles des intermédiaires, ces humains improbables de Le Brun, qui auraient bien pu habiter l’île du Docteur Moreau.
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Série « La bête en moi », 18 portraits, 2003
Extrait de La Bête en moi, publication de la bibliothèque Oupeinpienne, Edition Au Crayon qui tue n°7, 2000
Paru dans Du Potentiel dans l'Art Editions du Seuil, 2005
© Atelier Jack Vanarsky